Qui sont ces familles vaudoises qui ont choisi l'IEF ?

En 2021, la Revue suisse des sciences de l’éducation/Swiss Journal of Educational Research, publie une étude : Portrait des familles et motivations parentales de l’instruction en famille en Suisse romande, avec un fort taux de représentativité vaudoise. Cette étude menée sur l'initiative de Mme Christine Brabant, Professeure agrégée, chercheuse en éthique et gouvernance de l’éducation au Québec, met en lumière les profils des familles et leurs motivations.

En 2018, IEL-VD avait déjà sollicité les témoignages des familles. Retrouvez-ici les conclusions conjointes de l'association et du Pr. Brabant. 

En bref

Les familles IEF vaudoises à la loupe. Qui sont-elles ? Pourquoi ce choix d'instruction ?

Ref. Revue suisse des sciences de l’éducation/Swiss Journal of Educational Research : Portrait des familles et motivations parentales de l’instruction en famille en Suisse romande. 

Coauteurs : Christine Brabant, Tristan Donzé, chargé d’enseignement à la Haute école pédagogique des cantons de Berne, Jura et Neuchâtel, est chercheur dans le domaine apprentissage et évaluation. Mme Murielle Favre-Perret présidente de l’association Les Travailleurs de la Pensée, parent-éducateur et autodidacte, étudie le potentiel inné des enfants, Dr. Philipp Bubenzer est professeur en gestion des innovations et directeur du Centre pour l’Entrepreneuriat et l’Innovation. Haute École de Gestion Fribourg (HEG-FR) HES-SO — Haute École Spécialisée de Suisse occidentale

Profil des familles

Les familles sont-elles religieuses ?

Selon l’étude du Pr. Christine Brabant, seules 20% des familles ont une pratique religieuse régulière (christianisme, bouddhisme, hindouisme ou islam), contre 80% qui n’en n’ont pas du tout.

Cette pratique religieuse apparaît par ailleurs très loin dans la liste des raisons qui ont motivé les familles à adopter ce mode d’instruction. Elles font même parties des raisons les moins plébiscitées.

Portrait socio-économique des familles

Selon un récent pointage (2023), il apparaît que l’essentiel des familles présente un niveau socio-culturel assez élevé, mais un niveau socio-économique plutôt moyen, voire modeste. S’il y a certaines familles aisées, elles ne constituent clairement qu’une minorité. 

Instruire à domicile implique de facto la perte de l’équivalent d’un salaire. On entend souvent dire que l’IEF est l’école privée des pauvres. Cette interprétation mérite d’être nuancée, mais l’on peut remarquer qu’une perte de salaire consécutive au temps nécessaire à consacrer aux enfants est souvent compensé par des choix de vie impliquant une réduction des frais. Ainsi les familles décident souvent quitter les villes pour aller vivre en campagne.

Vivre à la campagne

La majorité des familles vit à la campagne (69,5%). Le reste privilégie les petites villes (21,2%) contre les grandes villes (9.3%). Ce choix est d’une part économique : loyers moins chers pour des familles qui vont devoir renoncer la plupart du temps à un salaire. D’autre part, les espaces de vie en campagne offrent souvent un cadre plus en accord avec les visées pédagogiques des parents.

Salaires et professions

Le revenu familial annuel médian chez les familles participant à l’étude de Mme Christine Brabant se situe entre 50 000 et 100 000 francs suisses. Les 45.8% des familles se trouvent dans cette catégorie. Les autres ont un revenu inférieur à 20 000 frs/​an (4.2%), de 20 000 à 50 000 frs (27.1%), de 100 000 à 150 000 frs (16.1%), ou supérieur à 150 000 frs par an (6.8%), soit une répartition semblable à celle de l’ensemble des familles suisses (OFS2018).

L’Association IEL-VD a quant à elle a relevé les professions des parents qu’elle a interrogé lors de sa propre récolte de témoignages en 2018 : Panorama de l’IHES dans le canton de Vaud, Les professions listées sont soit encore exercées, soit ont été interrompues, le temps de l’instruction en famille.

• secteur primaire : cultivateur — cueilleur de plantes aromatiques et médicinales, permaculteur, agriculteur.

• secteur secondaire : chocolatier, producteur indépendant de denrée alimentaire, ébéniste, vannier, conducteur de chantier, formation de cuisinier, viticulteur.

• secteur tertiaire : banquier, médecin, psychologue, psychothérapeute, infirmier, formateur et maître d’enseignement à l’UNIL, physiothérapeute, acuponcteur, aide-soignant, formation naturopathe, thérapeute indépendant, coach familial niveau master en psycho enfant et ado, infirmier en psychiatrie, ergothérapeute, thérapeute shiatsu vétérinaire, interprète animalière, ingénieur / développeur en informatique, informaticien indépendant, ingénieur, ingénieur agronome, designer industriel HES, graphiste indépendant, responsable ingénierie logicielle EPFL (human brain project), directeur de projets, formateur, entrepreneur, employé au service technique d’un foyer pour enfants, secrétaire, gérant administratif (dans un bureau d’architecte), agent d’exploitation, gestionnaire de vente, employé de commerce, resp. centre de formation, concertiste, professeur de musique, cantatrice, professeur dechant (autrefois), comédien, arts du spectacle (formation en cours), coach cinéma, écrivain, artiste peintre, ingénieur en environnement, formation d’ingénieur en gestion de la nature, animateur nature, organisateur de voyages, chef d’entreprise, directeur fiduciaire, autoentrepreneur : moniteur de portage, indépendant, député au Grand Conseil, ingénieur mécanique EPFL, Dr. ès science, ingénieur environnement EPFL, laborant en chimie, formation EPFL, développeur logiciels EPFL, coach adulte, architecte, dessinateur génie civil, resp design intérieur, concierge (par choix, avant assistant direction trilingue), diplôme universitaire non précisé, mécanicien, sapeur-pompier, assistant technique, formateur technique, avocat de formation, juriste de formation, éducateur spécialisé, éducateur social, disposant d’une formation à une pédagogie particulière, directeur d’institution petite enfance, maître socioprofessionnel (CPHA : centre pour les handicapés de la vue), logopédiste, enseignant à l’école d’herboristerie (VS), resp des formations Ville de Lausanne, formateur d’apprentis OFPC, orientateur et placements de jeunes AI, chargé de jeunes autistes Lavigny, resp pédagogique dans une institution sociale, formateur adulte, enseignants : enseignant, enseignant spécialisé, enseignant adulte, enseignant primaire anciennement enseignant spécialisé, police scientifique, linguiste, spécialisée en langues anciennes, psychologue en psychothérapie, secrétaire, diététicienne, professeur de yoga, éducatrice et institutrice, professeur de dessin, designer, naturopathe, chargée d’audit conseil, employée de commerce, formation d’école hôtelière.

• autre : recherche d’emploi, rente AI.

Les motivations des familles

Si l’on souhaite trouver une concordance entre les familles, il faut davantage se tourner vers les raisons qui ont poussé celles-ci à démarrer l’instruction à domicile. 

Mme Christine Brabant relève dans son étude les motifs suivants par ordre d’importance.

Motivation grande : 3 / moyenne : 2

Motivation de l’enfant / socialisation (2,9)

Enrichissement relationnel familial (2,67)

Programme d’études / méthodes (2,53)

Responsabilité parentale (2,53)

Liberté de l’enfant (2,34)

Expérience scolaire négative (2,31

Développement socioaffectif et personnel (2,21)

Motivation moyenne : 2 / faible : 1
Religion / spiritualité / morale (1,77)
Préparation de l’enfant (1,28)
Motivation faible : 1 / nulle : 0
Garçons (cadre d’apprentissage scolaire peu adapté à) (0,64)

Un premier choix ou un second choix ?

L’instruction à domicile vaudois est l’une des trois possibilités d’instruction possible dans le canton. La constitution prévoit ces trois alternatives.

Premier choix

Actuellement, pour 39% des familles interrogées par IEL-VD, l’IEF est un premier choix. Les enfants sont alors instruits dès le début de leur scolarité à domicile, essentiellement pour des raisons pédagogiques et/​ou liées au cadre de vie permettant de prendre le temps des apprentissages.

Second choix

Pour les autres 61% des familles interrogées par IEL-VD, il s’agit d’un second choix. Les enfants ont démarré dans une premier temps une scolarisation classique dans une école régulière, avant de se tourner vers l’instruction à domicile, souvent en raison d’une souffrance scolaire devenue intolérable et qui n’a pas trouvé de résolution dans le cadre scolaire.

Conséquences sur les enfants

Pour la très grande majorité des familles, le démarrage de l’instruction à domicile après une scolarisation régulière implique une période d’adaptation et de réajustement. Chacun doit apprendre à s’organiser, étudier différemment et vivre ensemble. Cependant, rapidement les enfants des deux groupes de familles que nous avons distingués jusqu’ici se rejoignent et finissent par se superposer. 

On voit alors émerger les premières conséquences positives pour les enfants et leur familles.

Voir l’article : Conséquences pour les familles et les enfants